JIU-JITSU face à la désinformation à l'ère du Covid : utilisation de l'apprentissage basé sur la réfutation pour améliorer l'adoption des vaccins et les connaissances des professionnels de la santé et du public

Problématique : 

L'hésitation vaccinale est identifiée comme l'une des dix principales menaces pour la santé mondiale par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), qui l'attribue en partie à la désinformation sur les vaccins. La course scientifique à la découverte d'un vaccin contre la COVID-19 s'est accompagnée d'une intensification de la désinformation. Or, dès le mois de mars 2020, les études réalisées dans le cadre du projet Coconel, mené en collaboration avec l’ORS Provence-Alpes-Côte d’Azur, ont montré que 25 % du public français n'accepterait pas un tel futur vaccin, un taux qui s’est accru jusqu’à la fin de l’année 2020, puis a amorcé une légère décrue avec la campagne de vaccination. Au Royaume-Uni, l'hésitation à se faire vacciner contre la COVID-19 s’est avérée liée aux croyances conspirationnistes relatives à la pandémie.
L'OMS a également identifié les professionnels de la santé comme les conseillers les plus fiables et ceux qui influencent le plus les décisions de leurs patients en matière de vaccination. Bien que la plupart de ces professionnels soient parfaitement conscients de la nécessité d'un vaccin contre le COVID-19, un nombre croissant d’études dans le monde, et plus particulièrement en France, a montré l’existence d’une hésitation vis-à-vis de ces vaccins (par exemple, chez 25 % des médecins généralistes de ville en octobre-novembre 2020 mais aussi parmi le personnel hospitalier).

Objectifs : 

Le projet européen JITSUVAX s'appuie sur une catégorie d'interventions décrites comme la persuasion "jiu jitsu". Le jiu jitsu est un art martial qui utilise la force de l'adversaire, plutôt que de tenter de le prendre de front. De même, JITSUVAX cherche à transformer le pouvoir délétère de la désinformation en un atout potentiel en mettant en œuvre deux idées clés : 1/ en expliquant comment la désinformation fonctionne au cours d'un processus connu sous le nom "d'apprentissage par la réfutation" ; 2/ en formant les professionnels de la santé à la pratique d’un entretien visant à réfuter les arguments critiques de la vaccination, afin de permettre à ceux-ci de communiquer plus efficacement avec les patients, et de neutraliser la désinformation lorsqu'ils y sont confrontés au cours des interactions avec les patients.

Méthodologie : 

Dans le cadre de ce projet, le rôle de l’ORS a été de coordonner la validation internationale d’un instrument de mesure de l’hésitation vaccinale parmi les professionnels de santé, le questionnaire Pro VC Be. Cette validation s’est appuyée sur une première version d’un instrument développé en français par l’ORS, en collaboration avec les universités de Sherbrooke et Laval (Canada), et testée au cours de l'année 2020 auprès de 2 700 professionnels de santé, en France, Belgique et au Québec. Il est également d’évaluer l’impact, auprès des patients d’une formation d’internes en médecine générale, à l’entretien réfutationnel par la passation, avant puis après la consultation, d’un questionnaire comportant un outil validé de mesure de la confiance vaccinale.

État d'avancement : 

Le projet a démarré le 1er avril 2021. La version française du Pro-VC-Be a été validée et un article publié dans la revue Expert Reviews of vaccines en avril 2022. Une version courte (10 items) a été préparée et validée au premier trimestre 2022 et un article publié dans la même revue. La version internationale a été finalisée à partir de la version française et utilisée dans le cadre d’une enquête internationale entre mars et mai 2022 dans quatre pays participant au projet (Allemagne, Finlande, Portugal et France). Les analyses de la validation indiquent une très bonne validité de contenu et validité prédictive de l’instrument, sur l’ensemble des pays participants. Trois articles ont été publiés pour valoriser les résultats de l’enquête internationale.
En 2023, une formation à l’entretien réfutationnel empathique a été préparée par l’université de Bristol. Quatre enseignants du département universitaire de médecine générale de Marseille en ont bénéficié en février 2023, et ont à leur tour formé 30 internes en médecine générale en avril 2023 pour les préparer à répondre aux différentes critiques de la vaccination de leurs futurs patients. L’impact de cette formation a été testé auprès de patients recrutés par ces internes durant leur stage chez le praticien (entre mai et octobre 2023). Les analyses sont en cours.