Les changements climatiques (voire globaux) avec leurs répercussions sur les écosystèmes au sens large et les pratiques, ainsi que l’émergence de nouvelles zoonoses, sont maintenant considérés comme inévitables. Les nouvelles incursions d'agents pathogènes zoonotiques doivent être anticipées, rapidement détectées et faire l'objet d'une évaluation des risques pour la santé publique et animale. Ceci vise à permettre : i) une meilleure compréhension des facteurs écologiques, épidémiologiques et socio-économiques qui sous-tendent les processus d'endémicité et d'émergence dans les populations humaines ; ii) et de la perception de la population générale et des professions à risques vis-à-vis de ces agents et des maladies associées ainsi-que des mesures de protection qui peuvent être prises ; et enfin iii) de savoir sur quel(s) curseur(s) agir pour diminuer le risque/les facteurs de risque. Le projet ARCHE s’intéresse à la fièvre hémorragique de Crimée Congo (FHCC) : il s’agit d’une maladie provoquée par un virus du même nom. L’infection par ce virus est, dans la plupart des cas, peu symptomatique mais elle peut aussi provoquer une maladie avec des formes sévères voire mortelles. La transmission du virus à l’humain se fait principalement par des piqures de tique du genre Hyalomma. La FHCC est endémique dans certains pays (Afrique, Asie, Moyen-Orient) et également présente dans certains pays d’Europe de l’Est et du Sud, et notamment en Espagne. En France, si le virus de la FHCC a été détecté pour la première fois sur des tiques collectées dans des élevages bovins du sud du pays en 2023 et en Corse, aucun cas humain autochtone n’a été constaté à ce jour.
Le projet ARCHE propose une méthode globale et opérationnelle innovante pour caractériser les socio-écosystèmes dans lesquels des émergences de FHCC sont susceptibles de se produire, étudier et comprendre les processus épidémiologiques à l'interface tiques-hôtes humains-animaux --dans le sud de la France et en Corse-- en estimant et en classant le risque actuel d'exposition et en modélisant les risques futurs d'émergence de la maladie et en évaluer les scénarios probables afin de proposer des stratégies bien acceptées et équitables pour les gérer. Une mise à disposition d’outil de détection pour la communauté qui travaille sur CCHFV sera aussi proposée. La problématique sera développée en prenant en compte les aspect virologiques, entomologique et socio et anthropologiques. Dans ce cadre, l’ORS sera chargé d’apporter une expertise en sciences sociales afin de réaliser des enquêtes en population (du sud de la France) et chez les groupes professionnels les plus exposés (éleveurs, vétérinaires, travailleurs des abattoirs, par exemple) visant à comprendre les perceptions, représentations et comportements vis-à-vis des maladies véhiculées par les tiques.
Des questionnaires seront construits sur la base des résultats des travaux anthropologiques qui seront d’abord conduits dans le cadre d’ARCHE. Ces questionnaires viseront à comprendre les facteurs comportementaux et environnementaux et professionnels pouvant favoriser l’exposition aux tiques impliquées dans la transmission de la FHCC, la perception des risques vis-à-vis de ces tiques, ainsi que la perception des éventuels moyens de protection (tels que par exemple, le développement d’un nouveau vaccin). Les questionnaires seront différenciés selon qu’ils seront proposés en population générale ou auprès de professionnels à risque : pour ces derniers, les travaux anthropologiques initiaux fourniront des informations précieuses pour les construire, en complément des donnés de la littérature. En population, une enquête sera réalisée sur le sud de la France via le panel Bilendi, auprès de 1000 adultes ; ce même questionnaire sera proposé également à des donneurs de sang. Des dispositifs de recueil en face à face avec des enquêteurs sont par ailleurs prévus pour divers types de professionnels potentiellement exposés.
Le projet a commencé le 1er octobre 2024. Les études sur les perceptions des risques devraient être préparées fin 2025 et réalisées début 2026.