De nombreux experts évoquent une crise de confiance du public à l’égard de la vaccination dans les pays occidentaux. Cette crise s’est traduite par la réduction de la couverture vaccinale (CV) de certains vaccins et l’interruption de certains programmes de vaccination : ceci a eu pour effet la résurgence d’épidémies de maladies qui n’étaient plus que rarement observées. La perception du risque de contracter une infection et de sa sévérité et celle de l’efficacité et de la sécurité du vaccin jouent des rôles centraux dans l’acceptation de la vaccination. Les médecins ont une influence sur les comportements de vaccination des patients. Mais l’avènement de l’Internet a modifié l’environnement de communication autour des vaccins : les mouvements critiques vis-à-vis de la vaccination, qui font de la sécurité et l’efficacité des vaccins un de leurs thèmes centraux, y fleurissent à nouveau.
Ce projet vise à mieux comprendre les connaissances, croyances, attitudes et pratiques de la population générale française à l’égard de la vaccination et leurs déterminants. Il s’agira notamment : 1) de mieux comprendre les facteurs influençant les choix de vaccination et la perception des risques et de l’efficacité des vaccins et les motifs pour se vacciner ; ceci sera effectué pour différentes vaccinations et groupes cibles : concernant les risques associés aux vaccins, on s’intéressera aux perceptions relatives aux adjuvants et à certaines autres substances entrant dans la composition des vaccins et ayant pu être incriminées par le passé ; l’analyse des perceptions liées à la sécurité et à l’efficacité des vaccins sera effectuée dans un cadre plus général en tenant compte que d’autres facteurs attitudinaux peuvent influencer les choix vaccinaux ; 2) de mieux comprendre l’influence des médias, de l'Internet, des groupes anti-vaccination et des professionnels de santé sur l’acceptation ou le refus des vaccins ; 3) d’étudier l’influence des facteurs socio-économiques et du niveau d’éducation dans les prises de décision des individus relatives à la vaccination ; 4) d'évaluer la pénétration des mouvements critiques vis-à-vis de la vaccination en langue française sur le net, leur contenu et les modalités selon lesquelles ils présentent l’information sur les vaccins.
Des entretiens qualitatifs ont été réalisés auprès de personnes concernant les vaccins pour lesquels la couverture est jugée insuffisante actuellement (visant de jeunes enfants, des adolescents ou des adultes). Un recensement et une analyse des sites Internet critiques à l’égard de la vaccination et/ou de certains vaccins ont été effectués ainsi qu’une analyse de leur contenu et de leurs arguments. Enfin, le module "vaccinations" du questionnaire du Baromètre santé (enquête nationale conduite par Santé Publique France) a été préparé en 2015. L’enquête proprement dite est terminée. Les deux phases précédentes apporteront des éléments de discussion du contenu du questionnaire de ce module, lequel permettra de mesurer l’hésitation vaccinale dans la population française.
Près de 60 entretiens qualitatifs ont été réalisés auprès de parents de jeunes enfants, de personnes avec un diabète et de mères d’adolescentes. Les entretiens chez les diabétiques ont été centrés sur la vaccination contre la grippe saisonnière. Ils montrent que cette vaccination fait peu de place à l’hésitation : en effet, une fois la décision prise, la plupart des personnes diabétiques s’y tenaient, se vaccinant (ou pas) de façon quasi automatique ; décision souvent liée à l’expérience passée des patients vis-à-vis de la grippe et/ou du vaccin. Une banalisation ou une relativisation de la grippe et de ses risques et la croyance que ce risque peut être maîtrisé autrement que par la vaccination, la crainte d’effets secondaires de la vaccination et un manque de confiance dans les autorités sanitaires étaient souvent avancés comme motifs de refus du vaccin. Chez les parents, l’engagement dans les questions de vaccination se traduit avant tout par la recherche du "bon" médecin auquel on pourra ensuite faire confiance et déléguer au moins partiellement la prise de décision : l’engagement vise à créer la confiance, qui permet ensuite un relatif désengagement. En 2017, plusieurs articles ont été soumis à des revues scientifiques et sont en cours de reviewing (notamment sur le volet qualitatif des entretiens avec les parents de jeunes enfants et les patients diabétiques).